Il s’en est passé du temps depuis Sans Chantilly. 10 ans, pour être précis. 10 ans durant lesquels Odezenne s’est montré toujours plus surprenant, toujours plus personnel et toujours plus hors du temps et des carcans musicaux. Succédant à Doltzinger Str.2 et à une tournée de concerts à la demande, Au Baccara se place dans le prolongement musical qu’on a appris à connaître de la part du groupe bordelais : éclectique, émouvant, et d’une musicalité bienvenue dans un paysage rap parfois trop dominé par des combos 808/boucles de synthés. Enregistré sur bandes à Londres, l’album bénéficie en effet d’un son riche et analogique. On est là face à de la composition musicale, et non simplement face à de la production. Exit les guitares et autres batteries et basses qui avaient pris une belle place sur Rien et sur Doltzinger Str.2, Odezenne s’épanouit cette fois entre synthés analogiques et boucles de boites à rythmes, et l’influence se ressent dans le flow et les textes d’Alix et Jacques. Encore plus musical qu’avant, Odezenne ? On dirait bien. Un peu plus triste aussi, à moins que ce ne soit le poids du monde qui vienne ajouter à leur poésie une dose de spleen en plus. Mais pas ce spleen déprimant, qui tire vers le fond, plutôt le spleen d’un coucher de soleil par temps de brouillard. Un été indien devenu un automne nucléaire, pourrait-on dire. Au Baccara, c’est la transposition musicale de la réalité de la vie d’Odezenne, sans idéalisation et sans apitoiement sur son sort. Nucléaire, entre jeu de mot et exercice de style -assénassions des mots, rimes en « -eu »- ouvre l’album avec poésie, racontant l’amour, la vie et l’amitié avec cette poésie simple qui caractérise le groupe depuis ses débuts. D’amour d’ailleurs, il en est beaucoup question...