Tame Impala – Currents

Tame Impala est un peu le genre de groupe que certains suivent depuis des années et considèrent comme le renouveau de tout un genre: le rock psychédélique. Pour les uns c’est « la meilleure formation actuelle », pour d’autres, c’est un peu « Pink Floyd et Yes en plus jeune », un groupe qui fait du neuf avec du vieux. Autant dire que la sortie du nouvel album des Australiens n’est pas passée inaperçue. Presque 2 mois après sa sortie, qu’en retient t’on finalement?

Currents est sorti en plein milieu de l’été, en pleine canicule même, et il a apporté un vent de fraicheur bienvenu. Vent de fraicheur car renouvellement d’un groupe qui voulait sortir de sa catégorie « Poids lourds du rock psychédélique » pour explorer de nouvelles perspectives sonores, et aussi- et surtout- vent de fraicheur car de ce renouvellement est sorti un son différent, savant mélange de funk et d’électro, mais ne reniant ni la réverb ni le psychédélisme un peu fou inhérent au groupe de Kevin Parker. Kevin Parker, qui semble désormais bien loin des riffs de guitares, tant les synthés ont la part belle sur cet album. Exit les accords s’étirant sur des minutes entières, place aux boucles de synthéthiseurs et aux modulations quasi oniriques. Toutefois, même si ce changement aurait pu annoncer un calme plat sur l’album, loin s’en faut. Currents, on l’a compris, romps avec les premiers Tame Impala. Mais cette rupture est-elle réussie? Indéniablement.

 

On est accueilli d’emblée par les presque 8 minutes de Let It Happen, qui bien que tournant dans nos oreilles depuis quelques temps déjà est toujours la bienvenue. A travers une surabondance de synthéthiseurs, Tame Impala accueille l’auditeur dans un nouvel univers musical, plus pop et onirique, qui va parfois chercher des inspirations dans bien d’autres genres, comme en témoigne l’interlude Nangs, qui rappelle par moment Flume avec ses nappes de claviers, tantôt le funk a l’ancienne avec sa basse ultra-groovy.  Et en deux morceaux, on retrouve déjà les inspirations et sonorités récurrentes de l’album: la funk, la pop, la basse et les claviers. Et a plusieurs reprises, on est surpris par les modulations et les sonorités apportées aux instruments, tant elles sont diverses et variés.

De basse, il en sera d’ailleurs souvent question dans cet album. Qu’il s’agisse de la ligne de basse de The Moment, qui fournit une base des plus solides a une surenchère de synthés -ainsi qu’a un bien joli arpège de guitare- ou de Cause I’m A Man ou elle se fait plus smooth, caressante et tranquille, elle se marie avec la batterie pour composer une session rythmique qui tient autant de la soul que du rock. Toutefois, tout n’est pas que rythme dans le monde de Tame Impala, comme le prouve la belle ballade Yes I’m Changing. Kevin Parker démontre ici son usage quasi parfait de son meilleur instrument: sa voix. A présent libre d’effets en tous genres, elle semble répondre aux claviers, et apporte une poignante émotion aux morceaux.

Et ainsi, de synthés en synthés, d’expérimentations en expérimentations, Tame Impala se créée une nouvelle patte sonore, s’éloignant des chemins battus pour en créer de nouveaux, qui leurs conviennent mieux. En résulte un album qui sonne tantôt comme les Beatles, Genesis, Jamie XX, voire parfois Pink Floyd, mais sans jamais les singer. Un doux souffle d’inspiration alimentant la flamme créatrice de Kevin Parker, qui signe ici un album dont la qualité est indéniable, mais qui est également désormais l’annonce d’une nouvelle direction sonore.

Du funk de The Less I Know The Better au prog’ de New Person, Same Old Mistakes, Tame Impala nous fait voyager à travers les époques dans un trip coloré et aux sonorités parfois folles. Et finalement, peut-être que sous ses déferlantes de styles différents, le cœur psychédélique était encore là, en train de battre. Le pari courageux de changer est une belle réussite pour les Australiens, qui s’imposent un peu plus en figures de proues dans le domaine de l’expérimentation électro-rock. Même si parfois on se sent un peu perdu, Tame Impala donne le bon conseil pour se plonger dans l’album: « Just let it happen ».