Arctic Monkeys – AM

 

Le quatuor prodige de Sheffield est de retour avec un 5ème album, faisant suite au mitigé Suck It And See, sortit il y a deux ans. Sobrement intitulé AM (en hommage au VU du Velvet Underground), l’opus s’inscrit dans la continuité de l’évolution voulue par le groupe depuis Humbug en 2009. Les garçons et leur influences ont changé, et cela se ressent clairement avec AM, disque toujours plus américain que ces prédécesseurs  qui risque de dérouter une fois de plus les fans de la première heure et de rock de jeunots anglais.

 

Produit par James Ford à Los Angeles, AM ressemble artistiquement à ce que beaucoup pouvaient attendre de ce disque il y a deux ans, après la sortie de Suck It And See : les 4 anglais ont grandit depuis le début de leur carrière, il y a dix ans. Le rock anglais énergique facile à laisser place à un rock beaucoup plus sophistiqué, aux influences à la fois rock glam, r’n’b ou plus classiques. Le groupe a tout changé : les 4 hommes vivent tous à L.A., sont des rockstars, ont de multiples projets en dehors d’Arctic Monkeys… Les tubes gueulards aux riffs accrocheurs comme I Bet You Look Good On The Dancefloor ont donc fait leur temps. « L’américanisation » du groupe entamée avec Humbug poursuit donc tranquillement son chemin.

 

Pour AM, c’est d’ailleurs la première chose qui marque : les anglais produisent des sons beaucoup plus osés, plus libres. Si ce pari fonctionne dans certains cas, comme avec l’apport des percussions, celui-ci peut aussi complètement foirer. C’est d’ailleurs là qu’on retrouve le plus gros défaut de AM : les cœurs. Alex Turner et sa bande ont certainement cru qu’ils donneraient une dimension supplémentaire à leur musique en plaçant des cœurs aigus sur 80% du disque. Mauvaise idée messieurs. Cela nous donne des moments désagréables à souhait, comme sur le raté Knee Socks. Dommage, ce refrain aurait put être bien mieux. Les cœurs viennent parasiter bon nombre de tracks, ce qui est fort regrettable. Pourtant, utilisés à petites doses, ils s’avèrent efficaces, comme sur la belle ballade No. 1 Party Anthem. On retrouve là tout le potentiel de chant et de songwritting d’Alex Turner, et nos têtes acquiescent en rythme. Une autre ballade agréable est Mad Sounds, hommage au Velvet. On regrettera tout de même une nouvelle fois ces cœurs qui en font trop pour cette musique.

 

Do I Wanna Know? entame magistralement l’album, avec ses guitares aiguisées rappelant la période Humbug, son chant profond et solennel, ses envolées magistrales sur le refrain… R U Mine? est une très bonne suite, le morceau se rapprochant le plus des débuts des Arctic. Encore une bonne guitare, un chant rapide, une batterie qui tape là où il faut, on ne demande rien de mieux. La suite de l’album est plus pénible. I Want It All en est l’exemple le plus flagrant : des chants aigus en continu, un rythme endormi qui parvient même à étouffer un des seuls timides solos de AM. On retiendra quand même le sympathique Why’d You Only Call Me When You’re High? et sa basse qui se distingue particulièrement, une première à ce niveau chez les Arctic, avant de laisser place à un bel ensemble porté par des paroles simples. L’album se conclut sur le très bon I Wanna Be Yours, sorte de réponse aux questions précédemment posées. Dans ce 505 de 2013, des synthés apparaissent (oui oui !), les percus dépassent la batterie, le chant de Turner est grave et beau, et les cœurs soulèvent enfin le tout pour nous faire oublier toute les déceptions qu’ont amené AM.

 

Les jeunes anglais sont devenus des roublards américains. Les préoccupations ne sont plus les mêmes, et la musique change. AM est le plus sophistiqué des albums de Arctic Monkeys, mais il s’éparpille le plus souvent dans une production trop libre. L’album est plus agréable à écouter titres par titres que dans son ensemble, ce qui donne un léger goût d’amertume quand on attendait l’album dans son intégralité.

5/10

 

  Artiste : Arctic Monkeys
  Album : AM
  Genre : Rock 
  Label : Domino Records
  Sortie : 9 septembre 2013