Random Access Memories : ce qu’on en pense, ce qu’il en restera

RAM
La sortie phare du moment, c’est l’inévitable Random Access Memories, 4ème effort de Daft Punk. Un album bien différent des ses prédécesseurs. De quoi dérouter plus d’un afficionado du duo, qui a choisit de s’éloigner des ordinateurs pour se rapprocher des instruments. Carton plein pour les critiques, tolé récurrent chez les fans. Et nous, en bons fans critiques, qu’est-ce qu’on en pense ? Avec Julien et
Pierre-Elie, on vous donne notre avis, surprises et déceptions. On vous dévoile aussi ce qui va se passer pour Daft Punk dans les temps qui suivent.

 

 

JULIEN :

Un petit mot sur l’album avant de présenter mes coups de cœur, Daft Punk présente une œuvre très complète, à la hauteur du matraquage commerciale des deux derniers mois, avec une variété assez impressionnante. Le duo suit toujours la même intrigue tout au long de Random Access Memories, son originalité de toujours, sa touche personnelle qui – même si elle peut soulever bien des critiques – est inlassable et qui est poussé à son maximum dans ce nouvel opus : « Ici, nous essayions de rendre les voix robotisées le plus humain qu’elles n’ont jamais étaient, en ce qui concerne l’expressivité et l’émotion ».

C’est extrêmement difficile de choisir un morceau plutôt qu’un autre dans cet océan qui était il y a encore quelques jours encore inconnu, mais je parlerai de 3 morceaux qui m’ont paru intéressant, qui ne sont pas forcément mes préférés, mais qui me plaisent, tout simplement.
Chilly Gonzales accompagne au piano les Daft sur Within avec un changement de gamme en intro bien prenant. Le morceau mêle à la perfection la partie instrumentale et l’électronique du synthé et des voix. En mettant les paroles en relation, l’impression d’un type perdu, mi-humain mi-rien est sublimée par le chant à la limite de l’humain qui tente d’émerger.
Second titre bien agréable, moins expressif mais apaisant au possible, Doin’ It Right. Autant les titres répétitifs ne me parlent pas vraiment mais cette fois l’exception est faite, ça vient sûrement des grandes ressemblances avec certains morceau du dernier M83 (qui mérite plus qu’un simple coup d’œil sur Midnight City). Ce titre n’est certes pas bien compliqué mais marche très bien, mes chers confrères n’en ayant pas discuté plus que ça, c’était l’occasion de le relever.
Pour finir, à l’unanimité  Contact. Pour ne pas rabâcher ce qui a déjà été évoqué, je vais essayer d’être le plus autentique. Premièrement l’intro est une des plus belles intros jamais crée, on y est, on est véritablement dans le studio, on vit Daft Punk. Heureusement ça ne s’arrête pas, ça s’amplifie, sous une rythmique hors du commun, fantastique, féerique, Daft Punk nous emporte loin, très loin, ça n’en fini plus, ça monte, monte, rien ne dérange nos deux génies, seulement les ondes elles-mêmes qui à la limite de l’ultra-son basculent tout, changent de gamme, et progressent une dernière fois avant de nous quitter sous les crissements, symbole même que la physique est dépassée. Daft Punk est sur-naturel.

Malgré quelques critiques qui ressortiront sûrement de l’opus – certes la fête se perd, Instant Crush ressemble plus à du Strokes qu’autre chose, les boucles sont parfois trop présentes, et j’en passe – Daft Punk reste aujourd’hui le seul groupe à pouvoir sortir un morceau comme Giorgio by Moroder.

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PIERRE-ELIE : 

A la première écoute, j’étais vachement enthousiaste parce que voilà, 8 ans qu’on attendait ça, on ne pouvait qu’être impatient. Donc, première écoute, vachement enthousiasme. Deuxième écoute, un peu plus poussée, et là, j’ai commencé à sentir mon cœur de fan se réveiller et une deuxième paire d’oreilles me pousser. Cet album est fabuleux, vraiment, pour moi c’est un sans-faute. Même si nombreux sont ceux qui s’élèvent contre le vocodeur, je rappelle poliment à tous ces soit disant puristes de Daft Punk que ça ne les a jamais dérangé sur One More Time. D’aucuns reprochent à Get Lucky ou Lose Yourself to Dance (dont la ligne de basse m’a retourné le cerveau) le coté Chic arrangé par Daft Punk. Bon, pour le coup, je suis assez d’accord sur le fond, mais c’est loin d’être une mauvaise idée ! Et puis attendez, les robots, qui sont les dieux de l’électro moderne, invitent un guitariste de funk légendaire et un chanteur fabuleux ! C’est le genre de combinaison qui ne peut qu’être excellente ! Oui, c’est différent, mais n’est-ce pas là qu’est le génie de l’album ? Peu d’artistes auraient eu le courage de prendre un tel risque, de produire tel album, et c’est ce qui le rend si brillant à mes yeux.
Bref, pour vous donner mon avis sur l’album, permettez-moi de paraphraser Pharell : Les Daft Punks sont des extra-terrestres. Ils viennent d’une autre planète, et pourraient repartir dès qu’ils veulent. Mais ils sont assez gentils pour rester. Et pour cela, je les remercie du fond du cœur. Si je devrais faire un top des tracks, ce serait :
1. Instant Crush avec Julian Casablancas, qui m’a fait planer sur un nuage de douceur.
2. Get Lucky parce que Nile Rodgers y est excellent.
3. Contact, pour ce retour en arrière qu’elle m’a fait faire. Du Daft Punk à l’ancienne remanié par les Daft Punk de maintenant, un pur bonheur.

 

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SAM :

Random Access Memories est, comme tout album de Daft Punk, un beau paradoxe. Pour la première fois chez le duo (si on ne prend pas en compte Tron OST ), on retrouve des instruments enregistrés en live. Ceci entraîne un changement radical vis à vis de ce que Daft Punk nous a habitué. En bien tout comme en mal. Cet opus est beaucoup plus symphonique, plus construit et recherché que ses prédécesseurs, comme en démontre sa conception qui a duré 5 longues années. RAM déroute plus d’un fan, qui s’attendait surement à un Discovery 2. Mais cela est typique de Daft Punk : chacun des 4 albums est incomparable à un autre. Mais on peut en effet reprocher à RAM de ne pas avoir cette « Daft Punk touch », si caractéristique du duo. Sur un titre comme Instant Crush, on se retrouve complètement dérouté : le truc est cool, mais c’est du Strokes (groupe du chanteur du titre, Julian Casablancas) ! Voilà pourquoi RAM déplaît à bon nombre d’auditeurs attendant des tubes dans la trempe de One More Time ou même Rollin’ and Scratchin’ pour les plus ambitieux. Je suis déçu par Motherboard, qui ne se démarque pas malgré une certaine symphonie en arrière plan et des percus intéressantes. Mais ce qu’il faut retenir de cet album, c’est le temps passé sur sa conception, qui engendre des perles comme on n’en voit plus à cette époque.

On ne peut que s’incliner devant un titre comme Giorgio by Moroder, première chanson à décrire la vie d’un artiste, et même plus. Durant 9 incroyables minutes, Daft Punk nous raconte, à travers la vie du producteur Giorgio Moroder, l’histoire du précurseur de la musique électronique, et même l’histoire de la musique. On passe, en moins de 100 secondes, par de discrets scratchs, un ambitieux solo de basse funky accompagné par de maîtrisés breaks de batterie, une boucle electro se transformant  en un missile acid techno surmonté d’un épique solo de guitare électrique sonnant presque rock glam. On finit sur un beat dictant notre rythme cardiaque, qui a gagné une bonne dizaine de bpm durant ce parcous incroyable. Quelques minutes plus tard arrivera Touch, une titanesque odyssée, un Bohemain Rhapsody moderne. Sous la voix d’un Paul Williams tantôt robot sans âme, tantôt chanteur à la voix de jeune adolescent fragile, on passe par tout les états imaginables. Wtf, oh, ah, hein, wow, haha, pfff, omg. On a du vocoding, de la chanson, des solos de saxophone sur fond de comédie musicale, des montées de violons nous amenant sur une musique d’orchestre, des chœurs  des bruits digne de Kraftwerk, pour finir sur un « I need something more » chanté sur un piano. Ce titre, qui compte plus de 250 pistes pour 497 secondes, a clairement la carrure pour figurer dans un « best songs ever ».

Les autres titres de RAM alternent entre chansons calmes et envoûtantes (Within, Beyond), grooves géniaux (Give Life Back to Music, Doin’t Right ) et folies orgasmiques (Contact, le meilleur final que Daft Punk nous ait jamais offert).

Daftprofil

 

Ce que nous réserve désormais Daft Punk

– Les deux robots ont déclaré lors d’une récente interview, que RAM, à l’instar de ces prédécesseurs Discovery et Human After All,  aura droit à son album de remixes. Mais la vrai bonne nouvelle, c’est que ce ne sera pas de gentils remixeurs à la production, mais les Daft eux-mêmes ! La seule nouvelle à ce jour, c’est un auto remix de Get Lucky, prévu pour la fin juin. Il est encore trop tôt pour parler d’un album entier. Ces remixes reviendront probablement vers un style plus électronique, où l’on reconnait mieux Daft Punk.

– Là où tout le monde attend Daft Punk, c’est sur le live. Alors, Alive 201?, c’est pour quand ? Pas en 2013 en tout cas, puisque rien n’est préparé. A vrai dire, le duo n’y a pas encore pensé, ou du moins pas suffisamment  Le premier soucis concerne sa forme : comment peut-on ajouter les chansons de RAM aux boucles composants les précédents opus ? En fait, on ne sait même pas si le live (s’il y en aura un) suivra la même formule. Connaissant Thomas et Guy-Man, c’est même peu probable ! Les remixes apporteront peut-être une solution.