Woodkid – The Golden Age

Woodkid-The-Golden-AgeLe rémois Yoann Lemoine, que l’on connait sous le pseudonyme de Woodkid, sort The Golden Age, son premier album. Clippeur pour Lana Del Rey, Rihanna ou bien Moby, on connaissait avant tout ses qualités de réalisateur. Il se lance dans son projet musical début 2011, quand sort Iron, son premier EP, où l’on trouve notamment le titre phare Iron et d’un clip fantastique, la pièce fait le tour de la toile et reçoit des éloges de toutes parts. On a rarement vu une entrée si remarquée. Restait à prouver que Woodkid n’était pas « l’homme d’un morceau ». L’enfant de bois a confié la production de son album à de nombreux musiciens de qualités, principalement à Guillaume Brière, moitié du fantasque duo The Shoes. Egalement entouré d’un orchestre, Woodkid nous livre une oeuvre bouleversante.

 

L’album débute sur The Golden Age, titre éponyme de l’album. On rentre directement dans l’univers crée par l’artiste : un mélange entre classique et pop, qui pourrait en laisser plus d’un sceptique sur le papier. Mais le mélange des codes de ces genre crée une ambiance totalement différente, portée par la voix grave et chaleureuse de Lemoine ainsi qu’un subtil mélange entre percussions, cuivres, piano. Woodkid pioche dans un genre, lui applique sa propre recette, et il en ressort une musique nettement différente, mais toujours plus attirante. On est pris dans un rythme très rapide, toujours dicté par des percussions extremement efficaces, sur un fond de musique d’orchestre. Le titre nous transporte, nous dépose là où il le veut pour nous raconter son histoire. C’est ça Woodkid : une grande musique sublimée par une histoire tout droit tirée d’un conte fantastique. Celui-ci se voit donné un héro avec Run Boy Run, titre donnant envie de s’évader, dicté par les paroles de Lemoine. Un rythme très rapide, coupé par de grandes envolées de violons, dirigé la voix de Woodkid.

Le garçon fuit vers The Great Escape. C’est dans ce morceau que je reconnais le plus l’influence du cinéma dans la musique de Woodkid. Après une intro plein d’espoir rappelant la fin d’un beau film romantique, on tombe tout en douceur sur une musique mélangeant un film d’enfant avec un film d’aventure. L’orchestration est magistrale, tout comme le sont le chant et les paroles. Ce morceau possède une très grande créativité, qui montre la qualité incroyable de cet album. Après la fuite, le voyage avec Boat Song. Un rythme beaucoup plus posé prônant la réflexion et l’observation. On est porté par un calme piano, des cuivres graves faisant leur apparition aussi discrètement qu’ils ne disparaissent. La mélancolie s’installe progressivement, comme le montre l’arrivée de I Love You. Tiraillé entre amour et tristesse, c’est néanmoins un rythme rapide qui reviens, avec le retour de percussions très fortes. Le chanteur joue plus sa voix, celle-ci semble plus vivante. L’orchestration est une nouvelle fois très réussie. La musique est sublimée par une envolée de violons qui nous jette des frissons plein le corps, puis nous abandonne subitement sur un son petit son de cloche.

La croisière entamée par Boat Song prend fin avec le rivage annoncé par The Shore. L’atmosphère du début est une nouvelle fois retombée, et ce titre, par son piano et sa mélancolie, s’impose comme une suite de Boat SongLe calme laisse place à une mélodie sublime, entraînante, grave. Cet espoir laissé par la fin de The Shore, on le découvre avec Ghost Lights. Les percussions font leur retour, mais le ton de la chanson, au début, reste grave, solennel. Le refrain nous redonne cet espoir qu’on attendait. De nouvelles envolées orchestrales nous font quitter la mer vers le ciel, un autre monde où les thèmes de ce voyage vont changer. L’atmosphère mélancolique reprend ses droits sur le triste Shadows. Le chant laisse place à un musique de mort, tellement sombre qu’elle en devient sublime, et laisse présager d’une arrivée, concrétisée avec Sabat Mater. C’est peut être mon coup de coeur de l’album. Produite par un SebastiAn en confiance avec cette casquette (il fait les beaux jours de Kavinsky, Charlotte Gainsbourg ou bien Philippe Katerine), on pénètre dans un monde inconnu immense, dont on ne peut voir les limites. Porté par de très lourdes percussions, des coeurs solennels, le titre nous assomme  On est complètement pris dans cette ambiance incroyable, que l’on retrouve si rarement de nos jours.

Pour se remettre de cette claque, on s’élève encore plus haut avec Conquest Of Spaces. Sur un air de flûte léger, Woodkid élève sa voix pour nous faire décoller encore plus. On se laisse transporter par toute cette musique et ces paroles, on perd petit à petit nos repères… Mais, tel Icare, on brûle nos ailes à vouloir aller toujours plus haut. C’est Falling qui nous le rappelle. Sous la forme d’un interlude, on arrive à ressentir une descente progressive, sans comprendre où elle nous mène. Puis tout s’efface, on se réveille sur Where I Live. Ce titre essaye de revenir sur les précédents. On essaye de reprendre nos souvenirs, mais rien ne viens. On apprend les rêves du personnage, ses ambitions. Tout cela porté par une musique à la fois pleine d’espoir, mais aussi de nostalgie. Arrive Iron, qui semble amorcer la fin de l’âge d’or. Tout ce qui fait la musique de cet album étant présent depuis le début avec cette chanson. De grandes paroles, une musique immense et vive, une nostalgie dédoublée d’espoir… L’histoire de Woodkid a débuté ici, celle de The Golden Age commence sa fin ici.

Mais la fin de l’âge d’or, dans notre histoire, appartient à The Other Side. Les percussions laissent place à des roulements de tambour. Les violons et le piano ont l’air plus tristes. Arrive, en seconde partie de la chanson, des coeurs confirmant ce qu’on pense : que cette musique est définitivement celle de la fin, il n’y aura pas de rappel. L’enterrement, c’est maintenant.

 

En plus d’être un album, The Golden Age est aussi un conte fantastique. Ce conte sera d’ailleurs, en plus d’être écoutable, raconté dans un livre de 140 pages co-écrit par Woodkid, présent dans l’édition collector de l’album. Contrairement à de nombreux artistes, l’expérience offerte par cet album n’est pas que musicale. Woodkid nous transporte dans un univers qui traverse les arts : on passe par le cinéma, comme peuvent en témoigner ses clips, tous excellents et magnifiquement remplis, mais aussi par la peinture ou bien la sculpture. L’album, du fait qu’il existe des liens entre les différentes pistes, prend d’autant plus d’intérêt que pour une piste en elle même. Cet album est une immense réussite, quelque chose qu’il est très rare de voir sortir de nos jours, d’autant plus en France. Le mariage osé entre classique, songwritting et pop, sur fond électrique  rend cela encore plus magistrale. Woodkid, avec sa musique, mais aussi son talent pour l’image, semble avoir toutes les clés pour se montrer comme l’un des porte drapeaux d’une nouvelle génération de musiciens. Suivons le, ce n’est que le début !

10/10

    Artiste : Woodkid
    Album : The Golden Age
    Genre : Classique / Pop
    Label : Green United Music
    Sortie : 18/03/2013