La Fiesta des Suds, royaume syncrétique

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En quête de découvertes au travers de la culture marseillaise, il fallait bien passer par le Dock ce week end où se déroulait un des festivals emblématiques de la ville.
Mêlant avec brio les époques, les styles et les cultures, la Fiesta des Suds propose un éclectisme rare pour un week end d’une grande intensité. Sans se laisser aller dans une course quantitative, il est quand même bien agréable de passer d’une ambiance à une autre en un claquement de porte, l’intérêt d’un tel événement dans une telle salle. Alors oui, on s’est fait plaisir et on a joué le jeu pour trois soirées parsemées de petites perles.

 

 

Jeudi, une première soirée riche en découvertes

La volonté était de mise mais la contrainte universitaire l’emporta… Quittant Luminy aux alentours de 20h, un 21, une douche et une assiette de pâtes plus tard c’est parti pour Plaza Francia – nouveau projet musical de Catherine Ringer qui rejoint les musiciens de Gotan Project. Sans que ce soit un style musical qu’on défende particulièrement, on passe un bon moment en compagnie de gars qui maîtrisent leurs instruments et qui nous servent un tango argentin parsemé de sonorités plus modernes et quelques basslines bien entraînantes. C’est aussi le moment de redécouvrir l’allégresse d’une des reines du paysage artistique français, d’autant plus que le groupe nous gâte en reprenant quelques classiques des Rita Mitsouko.

 

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À peine le temps de rentrer dans l’univers Ringer qu’il faut déjà se sauver si l’on veut avoir le temps d’apprécier Christine & the Queens sans pour autant rater le début de Massilia Sound System, tout une stratégie de la diversité se déployant. La représentation scénique est très travaillée, dressée sur la rythmique relativement saccadée des morceaux. Le plaisir que prennent Héloïse (de son prénom) et ses danseurs se propage allègrement sur un publique conquis – la salle des Sucres est saturée avant même le début du concert. La prochaine fois on restera plus longtemps.

 

 

 

IMG_3580 (2)Direction scène extérieure, la messe s’apprête à démarrer. Massilia Sound System, monument de la scène marseillaise, réunit un publique de tous horizons, du fan des débuts aux jeunes d’aujourd’hui qui se retrouvent tout autant dans le paisible message d’union que partage le groupe. Un beau moment, une belle leçon qui dévoile un peu plus en détail la synergie qui peut se déployer dans cette ville où règne le multiculturalisme.

 

 

 

Le publique est particulièrement joyeux et reprend en cœur n’importe quelle parole du groupe pendant plus de deux heures. Les musiciens affirment recevoir beaucoup depuis maintenant 30ans, une date qui sera d’ailleurs chaleureusement célébrée par une distribution de pastis – coutume apparente du groupe.

 

 

 

 

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L’appel nutritif suscite l’envie d’une légère escale vers les stands qui se transforma au final en un véritable parcours, à chaque coin de rue sa découverte. On résiste difficilement à une petite pause devant le Walkabout Sound System où l’intarissable DJ propose un enchaînement de titre groovy funk toujours plus entraînants. Un quart d’heure et quelques mètres plus loin c’est au tour de la délicieuse fanfare Banda du Dock de se dévoiler et on prend une sacré claque ! 18 musiciens parfaitement coordonnés qui interprètent avec aisance une myriade de classiques – de Led Zep’ à Nirvana en passant par un bon vieux Jackson – devant une foule captivée. C’est le moment de réaliser à quel point le festival jongle entre les styles sans jamais sentir le moindre déséquilibre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Vendredi, Chinese Man Family (entre autres)

 

On y a cru jusqu’au bout, mais la RTM a bel et bien coupé son réseau après un indicent produit dans la journée, alors oui c’est la tristesse d’autant plus pour ceux qui ne connaissent pas encore tout à fait le plan de Marseille. Force et persévérance ont permis au final une arrivée aux alentour de 20h30, à peine le concert de Selah Sue démarré et c’est tant mieux car on a encore les frissons en repensant à son passage au théâtre antique de Vienne deux ans auparavant. Le concert sera moins marquant cette fois ci – axé plus festival, donc moins de guitare/voix à la clé que l’artiste maîtrise pourtant si bien. C’était tout de même l’occasion de se déhancher sur ses quelques tracks groovy, de savourer son charmant timbre de voix et de découvrir quelques nouvelles chansons.

 

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Petit détour par la salle des sucres avec Pigeon John – rappeur originaire de L.A – avant de retrouver les moustachus. On passe un très bon moment en compagnie d’un gars proche de son publique qui présente pas mal de tracks de son 6ème et nouvel album qui rassemble de nombreuses collabs, dont une avec le touche à tout 20syl. C’était la bonne découverte de la soirée avant de retrouver tout le Chinese Man Crew à commencer par les Deluxe qui mettent une sacré ambiance dans les Docks. On entend au passage une phrase du genre « Tu sais Deluxe, c’est le groupe pour adolescent. » qui fait (légèrement) snob, certes c’est pas la révélation musicale de l’année mais la maîtrise est là et il faut savoir apprécier ce genre de groupes à leur juste titre : des mecs qui gèrent la scène.

 

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On enchaîne ensuite sur Chinese Man et c’est toujours aussi plaisant de partager un moment avec eux, une formation qui se fond d’ailleurs facilement dans le décor éclectique du festival. On redécouvre à quel point il savent et prennent plaisir à croiser les sonorités, de la batucada aux gros beats dubstep, tout le live progresse avec une fluidité admirable. Ça faisait un moment qu’on voyait affiché « Deluxe & Chinese Man » en versus sans jamais les croiser sur notre route, chose faite à présent pour une dernière partie de concert plus qu’enjouée. Le temps d’un agréable et calme passage sur Racing with the Sun, les techniciens s’activent pour transformer à nouveau la scène. Quelques instants plus tard, tous les MCs sont présents, l’abondance des instruments dévoile une nouvelle partie de l’univers C.M.. Une demi-heure de frénésie pour finir sur le fameux I’ve Got That Tune prolongé par le remix de Tha Trickaz l’histoire de s’essouffler jusqu’au bout.

 

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Même si la fatigue progresse, direction la Salle des Sucres où les DJs marseillais Superfunk finissent leur sets, c’est le moment de se poser avant de repartir pour le Cabaret où se produisent les DJs du label Chinese Man Records et ça aurait été dommage de rater ça ! Ils nous proposent un set à la cool et enchaînent des transitions de plus en plus scandaleuses – des Maitre Gazonga à Cyrpress Hill – sans jamais se planter, bravo les gars, ça c’est un Dj Set qu’on est pas prêt d’oublier !

 

 

 

 

Samedi, une nuit à double impulsion

 

3ème essai validé, les transports rétablis sauvent la mise. La Samba Orisamba – melt pot de musiciens de Rio, Salvador, Olinda et Marseille – réchauffe les premiers arrivés avec des rythmiques brésiliennes qui mettent le sourire, avant de retrouver Irma sur la grande scène. C’est pas le genre d’artiste qui va nous bouleverser, pour autant sa proximité avec le publique (avec des petites apartés toutes sympathiques) et sa joie de vivre décrivent un personnage très chaleureux avec qui l’on passe au final un bon moment.

 

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Quelques mois plus tôt, on avait pu apprécier la tendresse du cher Cascadeur lors de son passage au Cabaret Frappé – festival Grenoblois à la programmation très soignée – et le concert n’avait laissé personne indifférent. Deuxième service tout aussi captivant, les yeux clôts on se laisse bercer dans l’univers émotif qui envoûte petit à petit le publique présent.

 

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Ce doux moment devra être écourté, De La Soul s’apprête à rentrer sur scène et on ne se permettrait pas de rater ça. Pour le bonheur de tous, le groupe est accompagné de nombreux musiciens qui prolongent la base de samples et participent de l’atmosphère jazz rap – voyage temporel. Au 2/3 du live vient le moment de grâce de ce festival à l’écoute des premières notes de « Feel Good inc. », qui rappelle à quel point Gorillaz fait partie des classiques, et justement la bonne nouvelle du début de semaine dernière c’était Damon Albarn qui annonçait un nouvel album courant 2016 – le rendez-vous est pris.

 

 

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Le concert de De La Soul terminé, une longue nuit s’apprête à démarrer…

Winston McAnnuf régale la foule dans la Salle des Sucres avec le pianiste/accordéoniste Fixi et un dernier artiste aux percussions et beatbox. A trois, les musiciens proposent une musique riche et relativement chill avant que la salle ne se transforme en un énorme dancefloor affichant 40°c avec le Buraka Som Sistema. Mêlant les sonorités kuduro à des beats techno démesurés, le collectif retourne le publique, la sécurité contraint de jeter de l’eau en continue sur les premiers rangs. Certes on ne cautionne pas ce qu’on a vu, mais disons que ça fait partie de l’expérience.

 

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2h49, le publique est lessivé. Quelques instants plus tard, le duo péruvien Dengue Dengue Dengue prend en main le Cabaret et y impose progressivement son atmosphère. Après plus d’une heure passé devant ces jeunes artistes, on commence à trouver ça répétitif – les détails passent peut-être à la trappe après 3 jours de festivités -, une chose est sûre : on se laisse très facilement absorber par leur scénographie très soignée. La nuit se terminera pour nous avec les DJs Mumbai Science sur une première partie de set bien violente, le temps de s’adonner une dernière fois à la musique.

 

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Un bilan très positif pour notre premier passage dans ce festival – avec comme seul bémol l’absence d’eco-cup qu’on ne comprend pas vraiment pour un événement de cette ampleur.

On repart ainsi avec une liste d’artistes à suivre assez conséquente et c’est tant mieux, on commençait presque à se croire en automne.